LUX

Un disque d’EZ3kiel c’est bien. Voir le groupe en concert c’est mieux.

Le souci du groupe, axer son développement graphique dans ses concerts. Cela dévalorise un peu les disques du groupe. Qui reste attachant : en 20 ans, les membres du groupe sont passés par tous les genres pour soigner les ambiances et emporter l’auditeur dans une spirale de sensations.

Les petits gars de Tours expérimentent sans arrêt, ce qui est souvent preuve d’intelligence. Avec cette ambition ne soyons pas surpris que voir EZ3kiel prendre tout son sens et son ampleur sur scène. Avec tant d’années et de tournées, le groupe a une forte identité dans le milieu de la musique indépendante.

Ce nouvel album a le grand mérite de nous transporter dans un prog-rock qui oscille entre trip hop discrète et gentil metal. C’est assez incroyable tous les styles qui peuvent muter dans une seule chanson du groupe qui en plus a la bonne idée de ne pas faire des titres beaucoup trop longs (8 minutes maximum pour le premier morceau).

A l’heure où Pink Floyd pille ses archives, les Français cherchent vraiment à créer quelque chose de cohérent. On n’a peut être moins d’interactivités que sur scène mais le disque nous oblige à tendre l’oreille et nous attire dans un monde sonore assez fascinant, où tout semble à sa place pour choyer l’auditeur.

C’est un disque qui vient piquer notre curiosité. Il y a des pirouettes mélodiques qui donnent le vertige. Des plages calmes et lancinantes et des morceaux beaucoup plus cogneurs mais jamais disgracieux ou prétentieux. LUX impressionne et permet d’échapper aux monstruosités qui se collent à nos télés et nos médias. Il propose un rêve protéiforme. On plane avec eux ! Volez jusqu'à eux...

Interstellar

Pendant qu'un petit robot s'accroche à une comète, Christopher Nolan veut nous mettre sur orbite avec son nouveau film de science fiction!

Ce n’est pas un rigolo, Christopher Nolan. Depuis ses débuts, le temps l’obsède et nourrit sa virtuosité. En matière de science-fiction, il n’aime que les histoires de temps, d’espaces et de physique quantique. Pour lui, les mathématiques sont la solution à tout, la porte ouverte à tous les fantasmes.

Il nous fait tout de même rêver avec son concept de conquête spatiale en compagnie du meilleur acteur américain du moment, Matthew McConaughey. Au début du film, il a un look d’un agriculteur. Dans un futur proche, tous les pilotes ingénieurs deviennent agriculteurs pour sauver la planète de la famine. A trop polluée, la population est désormais piégé sur une Terre aride.

Mais notre agriculteur a toujours une petite navette dans la tête ! Un étrange concours de circonstances le pousse à grimper dans une fusée pour découvrir une possible planète habitable. En bon Américain, c’est un explorateur qui n’a pas peur du danger, un pionnier pour la visite de nouvelles galaxies, un ancêtre idéal du capitaine Kirk !

Avec Matthew McConaughey, les incohérences deviennent de délicieux sophismes scientifiques. Il est certain que le réalisateur de la trilogie Batman profite de la sympathie du comédien pour nous bricoler un film d’aventures tortueux, prétentieux et peut être plaisant.

Car Nolan veut ratisser large. Il y a comme dans Inception des boucles spatio-temporelles qui font creuser les ménages. De jolies actrices qui prouvent que les femmes sont sûrement l’avenir de l’Homme. Des théories grandiloquentes sur le destin, la vie, la place de l’homme dans l’Univers.

C’est indigeste mais comme il y a un acteur cool, pas de souci, on veut bien voyager même si on ne comprend pas tout ! Ce n’est pas grave : Nolan a quand même le sens du spectacle et sa vision des galaxies et des cinq dimensions (rien que ça) ont le mérite de dépayser grandement.

Nolan est très didactique, cela peut être pénible. Il n’oublie pas qu’il est dans la grosse industrie hollywoodienne et il faut du rebondissement à tous les étages de la fusée. Il voudrait être Kubrick pour le lyrisme ou pour la théorie. C’est un bon gros faiseur et si son film nous perd de temps en temps, il propose effectivement une vision nouvelle d’une obsession typiquement américaine : l’inconnu. Les grands espaces. La découverte. C’est cette volonté primitive qui fait de ce blockbuster présomptueux, un drôle de spectacle, parfois agaçant, parfois fascinant.

Avec Matthew McConaughey, Anne Atthaway, Jessica Chastain et Michael Caine - Warner - 5 novembre 2014 - 2h49

The Phosphorescent Harvest

Si vous voulez planer sans être hors la loi, le nouveau groupe de Chris Robinson vous offre sa dose d’effets ouatés et de rock psychédélique. Intemporel !

Quand il ne fait pas des tournées avec les Black Crowes et son frangin, Chris Robinson bricole une musique beaucoup moins blues que son premier groupe et plus ouverte sur des musiques pleines d’utopies mystiques, de visions colorées et de soleil californien.

L’illustration du troisième album du Chris Robinson Brotherhood est un modèle du genre : un pur produit psychédélique avec petites fleurs, paysages et créatures cosmiques. Chris Robinson, barbu et perché, disparaît totalement dans ce groupe où l’on retrouve entre autres, le guitariste de Ryan Adams, Neal Casal, assez inspiré par cette ambiance fumeuse et trippée.

Dans ce nouvel opus, Chris Robinson tente donc un rock plus barré que les Black Crowes. C’est tout aussi roots mais la nature des ambitions est différente. Effectivement, ici on navigue au bord de plages délirantes de sons bidouillés et vintage.

On pense évidemment au Grateful Dead car Robinson partage ce goût pour les rythmes qui s’étirent mais qui conservent leur influence rock. C’est un joyeux foutoir où l’on devine sur chaque solo, un plaisir partagé.

Les musiciens assurent. Il y a des références multiples mais le groupe réussit sa mission : nous faire voyager. Avec une pointe de funk, des instruments libérés et des idées retro, cette récolte phosphorescente nous plonge dans un univers barré et résolument vieillot. C’est le charme et la limite. On s’en moque, les vibrations sont bonnes. Sans nostalgie, le Chris Robinson Brotherhood est une belle découverte typiquement américaine !

Silver Arrow - 2014

Petit art de la Fuite

Si lire est l’un des grands plaisirs de l’existence, découvrir de beaux livres nous entraine toujours dans des moments de bonheur inégalables. Et celui-ci est un véritable enchantement.

Enrico Remmert est italien et ce Petit art de la fuite  est son troisième romain. Le turinois a en effet déjà été remarqué à la fin des années 1990 pour Rossennotti, qui a obtenu de nombreux prix.

L’auteur a également étudié dans une école de « creative writing » et la fréquentation de ce genre d’ateliers aurait pu lui donner des réflexes, des tics. Pas du tout. L’écriture de Remmert est fluide et vive. Ce roman dégage d’ailleurs un dynamisme, une énergie incroyables. Chaque page est pleine de punch, de bruits et de couleurs. Vivante. Et le choix de donner la parole tour à tour à chacun des protagonistes, entre monologue et tutoiement, donne au texte une véritable légèreté.

Dès le début, l’histoire est prometteuse. Trois copains qui vivent à Turin, à peine sortis du monde étudiant, partent ensemble jusqu’à Bari. L’un d’eux, violoncelliste, doit en effet  y jouer pendant quelques mois dans un orchestre.  Quant aux deux filles qui l’accompagnent, l’une d’elles les embarque dans « La Baronne », une vieille Fiat d’auto-école, tandis que l’autre ne sait plus où elle en est dans sa vie amoureuse. Cela pourrait paraître convenu mais, dès les premières pages, les situations cocasses, les événements loufoques, les quiproquos, les frayeurs et les grosses cuites s’enchainent.  Bref, très vite, le petit week-end calme devient un road-trip complètement déjanté.  Évidemment, rien ne se déroule comme prévu mais le lecteur est toujours surpris et amusé. Leur équipée, de jour comme de nuit, ne leur permet pas de repos ni de répit. Ils dorment parfois quelques heures au hasard des arrêts. Sans oublier les rencontres : un vieux sage, un restaurateur pressé ou encore un boucher pervers…

Portrait tendre d’une jeunesse qui a grandi trop vite et se retrouve aux prises avec ses doutes, histoire de belles amitiés et de sentiments forts, ce livre touche au cœur et met de bonne humeur. Un seul regret : il se lit tellement bien qu’on le finit trop vite !

éd.10-18, 240 pages.

No hit wonder

Voilà donc un petit gars qui annonce la couleur : ne comptez pas sur lui pour la révolution. Ne pariez pas trop sur son succès. Cory Branan ne sera jamais un champion du rock américain. Avec un titre comme No Hit Wonder, il fait preuve une humilité suspecte.

Car ce natif du Mississippi respecte toutes les règles du son du sud des Etats-Unis : c’est du bon vieux rock’n’roll, avec quelques pointes vintage et un accent qui glisse sur une guitare capricieuses et des rythmes empruntés à la country.

Pourtant Cory Branan n’est pas un réac : il est talentueux et son mélange a quelque chose de surprenant et d’ambitieux. Gamin, Cory Branan était fan de metal et c’est peut être ce recul qui permet aujourd’hui au musicien de faire comme les autres mais pas tout à fait. Il rappelle John Mellecamp dans ses grandes œuvres.

Il invite dans son disque des songwriters qui eux aussi ne veulent pas se limiter aux clichés du genre : Tim Easton, Jason Isbell ou Caitlin Rose. Le gratin vient soutenir l’effort du chanteur, son quatrième disque en 12 ans.

Il sait créer des ambiances très différentes à chaque chanson mais tous les titres de cet album sont accrochés au terroir musical. La slide guitar est présente mais il est vrai que la production est sacrément soignée et n’en fait jamais trop. On est bien dans la SunBelt américaine. On serait presque tenté par une séance de rodéo. Branan a le grand mérite de jouer effectivement sur la simplicité. Et la complicité. Des valeurs qui l’intéressent plus que le succès que le suppose le titre. Il y a les « feel good movies », No Hit Wonder est la version disque de ce genre.

Bloodshot - 2014

Agamemnon, Opéra Hip Hop

agamemnonLes "Erinyes"? Les "Atrides"? La "Guerre de Troie"? Ces mots n'évoquent pour vous que de lointains souvenirs de leçons d'Histoire ou de Grec ancien? D' de Kabal et ses fougueux camarades leur redonnent vie dans "Agamemnon", d'après Eschyle, le 9 octobre au Théâtre de Colombes et le 28 novembre au Conservatoire de Puteaux. La troupe de 17 comédiens / chanteurs / slameurs tient la scène pendant 2h15, livrant une performance physique impressionnante dans une interprétation qui réveille le genre de la tragédie antique*. (suite…)

Le Pérugin, maître de Raphaël, Musée Jacquemart André

perugin

Exposition sur le peintre italien Le Pérugin, source d’inspiration de Raphaël.

Une cinquantaine d’œuvres rapproche l’esthétique de Raphaël et de Le Pérugin au Musée Jaquemart André. Peintre à la Cité Médicis, Le Pérugin a apporté des éléments de décor à la chapelle Sixtine au Vatican, une perception singulière de la Vierge Marie et un sens du portrait admiré.

On prend plaisir dans ce musée à pouvoir approcher les toiles. On pose son regard sur la finesse du ciselé des feuilles d’or, le raffinement des tenues, l’harmonie des couleurs. Les yeux ébahis on contemple les drapés, la minutie des traits de visage. Avec un sens du détail et un art des jeux d’ombre et lumière remarquable, sa peinture inspire la sérénité et la tendresse.

Musée Jaquemart André

Moi assassin

Le saviez-vous? Avec son album "Moi, Assassin" Antonio Altarriba et Keko arrive à faire la synthèse d'American Psycho avec le style de Marc Antoine Mathieu! On pourrait même ajouter qu'il y a un peu de Franck Miller aussi.Vous me direz qu'avec un tel parrainage l'album doit être de qualité et bien c'est le cas!

Mais, c'est pas le tout de citer des références, il faut étayer, et bien allons y. BIen sûr nous ne sommes pas à New-York au milieu des années Golden Boys, mais dans le pays basque contemporain, dans ce pays basque oppressant que décrivait Munoz Molina dans "Lune rouge". Le héros est un universitaire, critique d'art. Mais comme le héros de Ellis, c'est un tueur. Un tueur qui n'a aucun besoin (comme si on avait besoin de tuer???), ni aucune nécessité à porter la mort. Il tue gratuitement, avec un mode opératoire toujours différent afin de ne pas passer pour un vulgaire serial killer.

Tout ceci est retranscrit dans un noir et blanc oppressant utilisé à la perfection comme peut le faire Marc-Antoine Mathieu. La comparaison avec ce dernier s'arrête là Mathieu jouant avec la forme continuellement, ce qui n'est pas le cas ici. On trouve en revanche un clin d'oeil au Sin City de Miller, puisque la seule couleur de l'album est le rouge utilisé chaque fois qu'il y a de l'hémoglobine, ce qui se produit fréquemment.

Le regard sur la société contemporaine en général et le petit monde universitaire en particulier est assez acerbe, les "mandarains" ne se faisant aucun cadeau, même s'ils sont peu nombreux à aller jusqu'au meurtre...Quoique, je vous laisse le soin d'aller jusqu'au bout des 134 pages que compte l'album pour découvrir tout le cynisme de ce petit monde.

Bekame

Depuis que ce nom, Sangatte est apparu dans l'actualité voilà 6 ou 7 ans, je ne peux m'empêcher de penser que le destin a gratifié les immigrants, comme destination, d'un lieu dont le nom raisonne comme une blague franglaise de mauvais goût.

En effet, si vous écrivez "sans gate" et que le deuxième mot est anglais, vous penserez comme moi qu'effectivement, la porte de l'Angleterre n'est pas ouverte pour tout le monde....

Le sujet s'est à nouveau invité dans l'actualité le maire français allant plaider l'aide de l'Angleterre outre-manche et s'est entendu dire que le prblème était franco-françis et qu'en aucun cas la perfide Albion ne l'aiderait. Une fois de plus la façon dont l'Angleterre se fait une idée de l'Europe.

En parallèle, le film "Samba" met aussi en lumière le phénomène de l'immigration contemporaine. Magistralement interprété par Omar Sy et Charlotte Gainsbourg, Toledano et Nakache donnent à réfléchir sur ces hommes qui vivent à côté de nous dans une réalité différente faite de peur et d'espoir, souvent déçu

Aurélien Ducoudray, reporter photographe s'adjoint les services de l'excellent Jeff Pourquié pour dépeindre, au travers des 2 tomes de Békame (2 albums de 94 pages, aux éditions Futuropolis) cette même réalité des gens partis du monde enier espérant trouver en Europe l'El Dorado.

Ducoudray décrit le destin de 2 frères qui se voient séparer dans une ville du Pas-de-Calais (qui n'a pas de nom...). On suit le destin du cadet qui lors de son dernier transport avant l'Angleterre, répétait de l'anglais dans un Walkman tout en contemplant une image du célèbre joueur de foot britannique. Le nom de celui-ci est donc retranscrit phonétiquement et donne le titre à ces 2 albums.

Grâce aux 2 frères, Ducoudray décrit tous les aspects de l'immigration, les passeurs, les combines, les astuces. Comme dans d'autres misères, certaines victimes devienent encore pires que les bourreaux, les moyens de s'en sortir ne sont pas toujours très propres.

Pourquié est moins fougueux dans son dessin que dans les extraordinaires albums commis avec le concours de Pécherot chez Castreman voilà quelques années. On se souvient de "Vague à lame" ou "Des méduses dans la tête " "Ciao Pékin". Rien à jeter dans ces 3 albums, que du bonheur avec toujours un arrière fond engagé et intelligent.

Le style s'est assagi mais il reste nerveux et personnel, s'adaptant parfaitement au propos. Comme dans Samba, les auteurs restent optimistes et d'une grande humanité. Leur point de vue est équilibré, jamais larmoyant. De la grande BD! Un bonheur.

The November Man

Houla ! Il y a encore des gens pour produire des films sans effet spécial et sans une durée délirante. The November Man n’a aucun intérêt sauf son format venu d’une autre époque !

The November Man est une erreur temporelle. Le film est réalisé par Roger Donaldson tout d’abord. Pour les plus jeunes ce nom ne vous dira rien. Pour les plus âgés, ils se rappelleront peut être du réalisateur de Sens Unique, film d’espionnage très eighties avec Kevin Costner et de Cocktail, film culte qui a placé sur orbite, Tom Cruise.

Le gars est donc un revenant et visiblement sa technique et sa mise en scène n’ont pas bougé depuis cette époque là. Tout comme Pierce Brosnan. L’interprète de 007 revient donc lui aussi dans le rôle d’un espion qui a tout vu tout connu durant la guerre froide.

On le réactive et évidemment c’est le début des emmerdes pour ce type qui va être obligé de se battre contre ses anciens amis de la CIA et un Russe forcément fourbe, pédophile et assassin. Mais notre vieil agent secret fait avec son style eighties : il casse tout et s’interroge ensuite sur le bien fondé de ses gestes.

Pierce Brosnan joue donc un salaud doublé d’un héros. C’est la bonne et quasi unique idée du film, jouer avec l’ambivalence et le manichéisme. Notre ancien agent est capable du pire. The November Man se veut old school. Tout se passe dans les décors des pays de l’Est. L’action n’est jamais impressionnante. Des types se tirent dessus et de temps en temps une bagnole explose. Rien de plus. Rien de moins.

Mais c’est aussi sans rythme et joué par des acteurs charismatiques comme des pantoufles tandis que le scénario rebondit sur des climax éculés, depuis l’époque glorieuse Gorbatchev-Reagan. On a franchement une hallucination devant cette production pourtant réalisée à notre époque. Sentimental, on devient indulgent, mais c’est sans panache, que November Man vient squatter nos écrans d’automne.

Avec Pierce Brosnan, Olga Kurylenko, Luke Bracey et Will Patton - Paramount - 29 Octobre 2014 - 1h43
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