Un amour Exclusif

Amour, suicide et mort. Ne vous enfuyez pas, Un amour exclusif de Johanna Adorjan est passionnant !

Un amour exclusif est un récit consacré aux grands-parents paternels de l'auteur. Ceux-ci ont décidé, de se suicider ensemble quand elle avait une vingtaine d’année. Il était gravement malade et diminué. Elle ne voulait tout simplement pas vivre sans lui.

Johanna Adorjan dans un style d’une simplicité qui refuse l’apprêt et se rapproche de la limpidité, évoque le parcours de ses grands-parents, juifs hongrois. Séparés une fois pendant la seconde guerre mondiale quand il est envoyé au camp de Mauthausen, dont il réchappera mais qu’il ne voudra jamais évoquer, le mari, médecin, restera toujours avec sa femme par la suite, en couple fusionnel.

Leur vie à Budapest sous le régime communiste se passe convenablement jusqu’à ce que l’insurrection de 1956 soit réprimée. En quelques heures, la famille décide de fuir et trouve refuge au Danemark où une nouvelle vie commence.

Johanna garde des souvenirs typiques de ses grands-parents : ces personnes qui paraissent âgées et qui couvrent d’amour leurs petits-enfants. Elle les a profondément aimés et c’est pour cela qu’elle vit leur suicide comme un évènement traumatisant.

Parallèlement à la description de leur parcours, le récit décrit leur dernière journée et leur passage à l’acte. Il faut que tout ait l’air normal aux yeux des autres alors qu’il s’agit des derniers moments. Sans doute, est-il nécessaire pour Johanna Adorjan de tout décrire car cela permet de comprendre un processus et un cheminement. Le lecteur est à la fois fasciné et horrifié par ce compte à rebours avant la disparition.

Ce livre permet de réfléchir à plusieurs sujets : la vie sous un régime sévère et répressif, la résilience des parcours personnels, l’amour qui nous lie à une personne et qui fait qu’on ne peut concevoir l’existence sans elle.

Au-delà de ces thématiques, ce livre marque par son écriture fluide et sa lucidité. Johanna Adorjan cherche à comprendre la vie de ses grands-parents et leur passage à l’acte. Ce faisant, elle nous ouvre des portes, elle nous interroge également.

10/18 - 184 pages

Le Cabinet Vaudou des Curiosités d’Adèle

C'est une voix tiraillée entre le chant élégiaque et un ton plus détendu, parlé, pesant chaque mot pour y découvrir sa poésie. Membre du groupe Tue Loup, Xavier Plumas a besoin de liberté. Il  a toujours eu des projets à coté. Il aime les aventures collectives comme les plaisirs solitaires.

C'est le cas avec ce second disque sous son nom. Le bonhomme s'épanouit. Il se fait plaisir. Il travaille avec une vraie liberté sans compromis. Il nous invite donc dans un étrange cabinet, mystérieux, où il s'occupe de travailler les ambiances!

Le style pourrait être folk mais il prend aussi la tangente pour délicatement tisser une atmosphère à la noirceur jamais mortifère. Ce que l'on entend chez Xavier Plumas, c'est une vraie douceur et un amour véritable pour les écritures électriques mais sensibles.

La musicalité de l'ensemble se laisse découvrir au fil des écoutes. Il y a toujours une guitare sous tension et la voix si particulière de Xavier Plumas mais il sait diversifier les structures et donc des ambiances magiques car très différentes. Et pourtant il y a une cohérence sur cet album qui pratique le rock comme de la sorcellerie.

Il y a une forme de mystère autour de ces compositions simples mais qui révèlent petit à petit une complexité plus étonnante. On s'y attarde pour y découvrir les petits secrets mais malgré tout, la réussite du disque reste une belle énigme.

L'autre distribution - 2014

J’ai de la chance, Laurence Masliah, Lucernaire

chance

Laurence Masliah dévoile ses talents d’écrivaine et de comédienne en interprétant son propre récit de l’histoire bouleversante des enfants Juifs de Moissac. 

Seule sur scène, elle incarne deux personnages: une grand-mère, affaiblie perdant la mémoire, et sa petite fille, assoiffée de rassembler le puzzle de son histoire avant qu’il ne soit trop tard. Il faut l’immense talent de Laurence Masliah pour jongler entre deux rôles, changer de personnalité, d’âge et de langage, qui plus est avec autant de douceur. Elle impressionne par la souplesse de son interprétation, véritable gymnaste du jeu, capable non seulement d’incarner deux personnages à la fois, mais ce faisant de feindre la perte de mémoire, la confusion de mots et, en suivant, de reprendre le fil.

Une prouesse d’interprétation donc, mais aussi d’écriture, car le récit de Laurence Masliah est aussi vrai que bouleversant. Oui, les enfants juifs de Moissac ont vraiment été sauvés, grâce à Shatta et Bouli Simon en premier lieu, mais également à l’aide et à la complicité de toute une ville les aidant à obtenir de faux papiers et les gardant scolarisés et cela, Laurence Masliah ne l’oublie pas. La forme est aussi soigneusement travaillée que le fond. Les amoureux des mots et des expressions désuètes, étymologistes amateurs et perfectionnistes psychotiques de la langue française, sont particulièrement servis.

Une oeuvre profondément émouvante.

Jusqu’au 8 novembre, du mardi au samedi, à 21h,

au Théâtre du Lucernaire

De et par Laurence Masliah

Collaboration Marina Tomé

Dramaturgie Mariette Navarro

Mise en scène Patrick Haggiag

 

 

Deltas

Sous sa casquette, il y a des idées en pagaille. Il les maîtrise avec une classe folle pour un album coloré, accessible et aventureux! Une réussite!

Chapelier fou a une idée du pays des Merveilles! C'est un patchwork sonore. Avec des influences très diverses comme des beats efficaces et des coups de violons. Il y a la volontaire nappe synthétique qui rapproche le dj Louis Warynski d'un Brian Eno en pleine exploration.

Son troisième album célèbre ce savant mélange des genres. Il y a des  notes planantes comme des sons dansants. Il y a du bidouillage comme on trouve un véritable lyrisme dans chacune des chansons. Son style est singulier, très loin des codes commerciaux qui polluent les ondes radios.

A trente ans, Chapelier Fou est devenu un adepte du jonglage entre la tradition, ce violon délicat et résolument moderne et les machines, couches obligatoires pour toute construction sonore. Il n'a pas peur des ruptures pour mieux conserver ensuite son équilibre musical. Deltas appartient à ces disques que l'on doit écouter plusieurs fois avant de percevoir des petits détails toujours croustillants.

L'artiste réussit à faire de chaque écoute une nouvelle expérience, ce qui n'est pas facile. Sans trop en faire. Sans être démonstratif ou pompeux. Deltas est une succession de morceaux magiques par leur richesse et leur beauté parfois pas évidente à entendre.

Mais c'est un monde à explorer. Deltas est une visite dans une contrée rare et fascinante. Peu de dangers pour les oreilles mais pas mal de plaisir pour les mélomanes. Vous connaissez l'adresse si vous voulez passer de l'autre coté du miroir.

Ici d'ailleurs - 2014

Intérieur, Maurice Maeterlinck

Un spectacle en japonais surtitré en français, interprété par la troupe du Théâtre de Shizuoka, mis en scène par Claude Régy, en ce moment et jusqu'au 27 septembre à la Maison de la Culture du Japon à Paris. (suite…)

3 Coeurs

Le personnage de l'infidèle semble passionner Benoît Poelvoorde. Après la comédie Le Grand Méchant Loup, le voici encore torturé par la passion pour une femme et sa fidélité pour une autre. Le problème est nettement plus dramatique lorsqu'il s'agit de deux soeurs.

Il est donc un mélancolique contrôleur fiscal qui fait une rencontre nocturne, après avoir raté un train. Un coup de foudre. Beau et pudique. Marc rencontre Sophie au hasard d'un voyage professionnel. Ils veulent se revoir. Hélas, un malaise cardiaque l'empêche d'arriver à l'heure.

Sophie imagine un goujat. Déçue, elle part pour les Etats Unis. Désespéré, Marc retourne en province pour retrouver ce rendez vous manqué. Il croise alors Sophie, une charmante antiquaire. Le charme agit. Ils tombent amoureux. Mais Marc tombe dans un piège cruel lorsqu'ils découvrent que ses deux dernières conquêtes sont soeurs...

Benoit Jacquot ne fait pas dans la finesse. De temps en temps, une voix off très littéraire nous rappelle que nous sommes dans le vrai mélodrame, la tragédie ultime et contemporaine, le jeu sans pitié du hasard et du destin. Il y a aussi une musique oppressante pour suggérer l'inexorable drame.

Quelques plans ne manquent pas non plus de panache, à la limite de la parodie. Heureusement le réalisateur d'Adolphe, respectueux du genre, a la bonne habitude de s'entourer de comédiens incroyables. Ce sont eux qui amènent la nuance, la nostalgie et la beauté des sentiments!

Benoît Poelvoorde est une fois de plus magnifiquement volage. Les rôles plus sérieux lui vont décidément très bien. Il  a aussi de la chance de rentrer dans une chouette famille, entre la grande Catherine Deneuve, la diaphane Charlotte Gainsbourg et la subtile Chiara Mastrioanni.

Ils nous font oublier les références appuyés comme Maupassant, Tchekhov ou même Chabrol pour la vision aigre de la bourgeoisie de Province. Il y a un coté un peu scolaire chez Jacquot. Il a la bonne idée d'en jouer dans une dernière image qui remet tout en cause. Elève doué, sage, Benoît Jacquot est un petit malin. On aime son film mais une touche de cynisme est suspecte quand on réussit si bien les mélos! Faiseur ou artisan, ca reste à voir...

Avec Charlotte Gainsbourg, Benoît Poelvoorde, Chiara Mastroianni et Catherine Deneuve - Wild Bunch - 17 septembre 2014 - 1h45

Le Royaume

Il est toujours intéressant d’observer le spectacle du pouvoir clivant de certains talents. Emmanuel Carrère, installé depuis une quinzaine d’années au sommet de la littérature française contemporaine (avec quelques autres – Echenoz, Houellebecq…) continue à susciter, à parts égales, admiration et exaspération. Admiration d’un lectorat toujours plus large qui a fait de son dernier ouvrage un succès de librairie immédiat (plus de 100 000 exemplaires vendus fin août, avant même la rentrée et son bruit médiatique).

Exaspération de certains professionnels au premier rang desquels le jury Goncourt dont certains membres se sont exprimés très tôt « contre ». Pierre Assouline sur son blog le 23 août avec un article titré « L’égo-péplum d’Emmanuel Carrère » y procédait à une exécution en règle de l’homme et de l’œuvre. Et le président du jury lui-même, Bernard Pivot, enfonçait le clou dans sa chronique du JDD le 31 août en accablant Carrère du péché d’orgueil et de vanité (« autant de moi moi moi, autant de satisfaction d'être ce qu'il est et d'écrire ce qu'il écrit est navrant. L'humilité chrétienne et la modestie laïque ne sont pas son fort. »). Pas vraiment une surprise, donc, que Le Royaume ne soit pas dans la première liste publiée des ouvrages admis à concourir au Goncourt !

Mais quelle importance après tout ? L’essentiel réside dans le bonheur du lecteur à retrouver, cet automne, le nouvel ouvrage d’un écrivain talentueux et érudit, égocentrique et drôle, iconoclaste et passionnant. Ouvrage est d’ailleurs le mot juste. A la fois « volume broché contenant un texte scientifique ou littéraire » et « objet produit par le travail d’un ouvrier ou d’un artiste ». Emmanuel Carrère est exactement ça : un ouvrier et un artiste.

Passé des débuts littéraires prometteurs jalonnés par cinq romans entre 1983 (L’amie du jaguar) et 1995 (La classe de neige, prix Femina), Emmanuel Carrère s’oriente à la fin des années 90 vers un travail plus personnel et original, mêlant enquête, biographie et… introspection.

Il inaugure ce virage avec L’adversaire (paru en 2000), reconstitution de l’affaire Romand, cet homme qui pendant 18 ans s’est inventé une vie de médecin et de chercheur auprès de l’OMS et qui, en 1993, a assassiné parents, femme et enfants sur le point de découvrir la vérité. Fasciné par le personnage, Emmanuel Carrère suit l’affaire, puis le procès. Visite Romand en prison et, sept ans après les faits, publie un livre-événement qui marque le début d’une seconde carrière. Il y parle de l’affaire, il y parle de l’homme, il y parle de lui, il y parle de son travail… Il y parle de la vie ! Et il y donne surtout à lire une langue exigeante et fluide, captivante de bout en bout, pénétrante, bouleversante – au sens propre du terme en ce qui me concerne. Ce choc littéraire sera suivi d’autre de la même qualité, de la même intensité.

Un roman russe (2007) chronique de son voyage en Russie, le pays d’origine de sa mère, pour un documentaire très personnel, Retour à Kotelnitch. Carnet de bord, règlement de compte familial, introspectif jusqu’à l’extrême, dénué de toute pudeur (ce sera désormais une des marques de fabrique d’Emmanuel Carrère)… Un roman russe est tout cela, mais par-dessus tout une œuvre littéraire contemporaine majeure.

D'autres vies que la mienne (2009), titre sublime d’autodérision au regard du narcissisme (assumé) de l’auteur et sans doute le chef d’œuvre d’un auteur qui prête cette fois sa plume à des hommes et des femmes croisés en chemin. 300 pages de beauté sublime et d’émotion intense.

Limonov (2011) se présente comme une biographie plus classique d’Edouard Limonov, écrivain, dissident, poète, punk et clochard, fondateur du Parti national-bolchevique. Classique jusqu’à un certain point puisque, comme à son habitude, il y mêle considérations personnelles, digressions sur les coulisses de son travail et sur sa vie privée. Du Carrère pur jus qui exaspère ou qui émerveille. Horripilante tête à claque ou écrivain libre et génial. Vous connaissez mon camp.

Changement de décor avec Le Royaume. Travail de longue haleine dont les racines plongent loin en arrière, à une époque (brève, 2 ans) où Emmanuel Carrère traverse une crise mystique qui le conduit à assister à la messe chaque jour, à prier avec ferveur, à se confesser régulièrement… et à étudier les textes sacrés, chaque jour, méthodiquement, compilant ses analyses et ses réflexions dans des cahiers qui s’accumuleront au fil des mois (18 au total) avant de finir dans un carton au fond d’un placard quand la crise (mystique) sera passée. Retrouvés longtemps plus tard, ils sont la base de ce travail qui nous emmène sur les traces des apôtres Paul et Luc qui, portant la parole du Christ, prêchant sans cesse chacun avec ses méthodes propres, ont contribué à transformer une petite secte juive comme il en existait tant à l’époque en une religion qui touche aujourd’hui le quart de l’humanité.

Il faut dire que la partie n’était pas gagnée d’avance : « Résumons : c’est l’histoire d’un guérisseur rural qui pratique des exorcismes et qu’on prend pour un sorcier. Il parle avec le diable, dans le désert. Sa famille voudrait le faire enfermer. Il s’entoure d’une bande de bras cassés qu’il terrifie par des prédictions aussi sinistres qu’énigmatiques et qui prennent tous la fuite quand il est arrêté. Son aventure, qui a duré moins de trois ans, se termine par un procès à la sauvette et une exécution sordide, dans le découragement, l’abandon et l’effroi. Rien n’est fait dans la relation qu’en donne Marc pour l’embellir ni rendre les personnages plus aimables. A lire ce fait divers brutal, on a l’impression d’être aussi près que possible de cet horizon à jamais hors d’atteinte : ce qui s’est réellement passé. » (page 556).

La grande force d’Emmanuel Carrère, c’est de mettre son lecteur en confiance, en confidence. Pas question de se payer de grands mots ou de jargon philosophico-religieux abscons. Pas question non plus d’abdiquer une nécessaire exigence intellectuelle pour aborder ces questions qui, au cours des siècles, ont façonnées notre civilisation. C’est donc en bonne compagnie et sur le ton d’une aimable conversation érudite « qui ne se prend pas (trop) au sérieux » que l’on part sur les chemins rocailleux du bassin méditerranéen, au premier siècle de notre ère, dans les pas de Paul, le prêcheur infatigable, puis de Luc, le médecin devenu témoin de l’aventure et scribe du premier.

Ce qui passionne Emmanuel Carrère, ce sont les coulisses des évangiles. Qui a écrit quoi, à quel moment, dans quelles circonstances, avec quel état d’esprit… Qu’est ce qui est de l’ordre de la métaphore (ou de l’affabulation pure et simple) et qu’est-ce qu’il faut prendre au pied de la lettre (ou qui, du moins, est très plausible). Fort d’un travail long et minutieux sur les textes (et les exégèses qui en ont été tirées) et de son expérience d’écrivain («Je sais de quoi je parle. Après tout, je suis du bâtiment » dit-il quelque part), il met le doigt sur certaines ficelles narratives et, a contrario, valide d’autres passages qui « respirent l’authenticité ».

Et pour mieux imprégner son lecteur de la portée des événements dans lesquelles il les plonge, il n’hésite devant aucun moyen, aucune métaphore. Staline, Lénine, Ben Laden, le générale de Gaulle, Mel Gibson, Lucky Luke, Philip K. Dick parmi beaucoup d’autres sont convoqués pour les besoins de la cause. Des fort en thème aussi, bien sûr : Ernest Renan et Paul Veyne, notamment. Et pour que la mesure soit bonne, il nous fait témoin de nombreuses tranches de vie personnelle (jusqu’aux plus intimes) dont le rapport au sujet central, parfois lointain, n’en fini pas moins par faire sens.

Il faut être Emmanuel Carrère pour agencer tout ça avec naturel et élégance. Pour donner au lecteur cette agréable sensation de proximité avec ses « personnages » et avec lui-même. Surtout pour, au sortir de ces plus de 600 pages denses d’un livre « total », le laisser sur cette irrépressible envie d’y retourner voir (je n’ai pas dit « croire »).

POL - 630 pages

Le Monde Möö

Ils se déguisent ou se maquillent. Il y a trois filles et un garçon. Ils jouent. De la musique. Et pas seulement. Ils s’imaginent un univers joyeux, ouaté et mystique. Des extraterrestres sous extasie. Ils interprètent des voyageurs célestes allumés avec des chansons venues des années 70.

Pas de solo héroïque à la guitare ou de la sauvagerie électrique. Ils ont retenu le psychédélisme et la musicalité rêveuse du mystique King Crimson ou nos indécrottables Gong. Une séance de musique élégiaque, dans la lune ou dans les songes.

Cela donne donc un disque bizarre mais aux mélodies envoutantes. Moins cyniques qu’un Sebastien Tellier, le collectif français Moodoïd s’envole vers des plages lyriques où les voix et les harmonies nous bercent. Le titre de l’album souligne bien la mission d’immersion que s’est donné le groupe, Le Monde Möö.

De l’ambiance feutrée, il ne faut pas imaginer que le groupe est flemmard. Bien au contraire. On appréciera les constructions élégantes et pas si simples de leurs chansons mélancoliques et sophistiquées.

Certains vont trouver cela un peu trop précieux, mais il y a de la sincérité avec des textes en français et une vraie ambition artistique. Pablo Padovani et ses copines ont des airs de clowns pédants mais ils forment un groupe qui propose vraiment quelque chose de différent.

Ils ont l’air un peu taré comme ça. Mais ces descendants de Magma naviguent sur toutes les musiques avec un entrain nouveau et une fantaisie appréciable car totalement aboutie. On décolle avec eux. Leur monde est habitable !

Entreprise - 2014

Qui danse pour Bruno Mars?

Amère Russie


Un conflit pousse l'autre et l'on zappe de l'Ukraine à l'Irak, du Mali à l'autre bout du monde comme pour un film ou une chanson...

C'est l'époque qui veut ça ma brave dame! Et voilà que 2 jeunes auteurs nous replongent 20 ans en arrière dans le conflit Tchétchène. Ducoudray et Anlor nous ramènent en plein conflit qui a coûté la vie à de nombreuses personnes et notamment à la journaliste Anna Polikovskaia. Faut-il évoquer la langue de bois et la main de fer de Poutine? Il suffit de regarder l'Ukraine d'aujourd'hui pour comprendre si vous n'aviez pas l'âge!

Alors bien sûr des histoires de geurre on en connait. Mais ici, l'originalité réside dans la démonstration qui passe, sans pathos, par la mère de Volodia, jeune recrue qui a disparu en Tchétchénie. L'album débute par l'insouciance d'un adolescent s'amusant avec son chien et ses copains et puis dès la troisième planche, on comprend que le conflit a enlevé le jeune homme à sa mère qui le recherche désespèrement.

Le héros de la guerre c'est bien cette vieille dame qui parcourt des centaines de kilomètres persuadée que son fils n'est pas mort. Elle est belle avec toute sa naïveté faisant confiance au premier venu qui ne manquera pas de la berner. Elle est merveilleuse face aux brutes de tous les camps qu'elle n'a pas peur d'affronter espérant leur soutirer quelques renseignements qui pourraient la rapprocher de son fils.

La collection Grand Angle des éditions Bamboo a pris l'habitude de commettre des albums de qualité, lançant de jeunes talents prometteurs qui souvent atteignent un certain degré d'excellence dès les premiers albums. On se souveint ainsi de l'excellent "Envolée sauvage" de Galandon et Monin qui abordaient la déportation ou "Bourbon Street" de Charlot et Chabert qui parlaient de jazz sur fon de ségrégation raciale ou le contraire, pour ne siter que cela.

Aurélien Ducoudray nous offre un scénario vivant et enlevé ou la petite histoire donne une bonne perspective sur la grande Histoire. Le dessin de Anlor est parfait semi réaliste, nerveux se mariant parfaitement avec ses couleurs ce qui n'est pas si fréquent de nos jours. Cette jeune dessinatrice avait déjà fait montre d'un talent certain dans une autre série parue dans la même collection "Les innocents coupables". On notera enfin la qualité du dossier figurant en fin d'album et qui complète admirablement bien l'album

C'est donc avec impatience que l'on attend la suite d'"Amère Russie" après ce premier tome "Les amazones de Bassaïev" qui promet le meilleur pour la suite. Les auteurs ont d'ailleurs de beaux jours devant eux. Ils pourront traiter par la suite la Géorgie avec le conflit en Ossétie  du sud, s'en suivra peut-être quelques albums su l'Ukraine et d'ici là il y en aura peut-être d'autres...

46 pages - Bamboo Grand Angle

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