Catacombes

On connaissait la Porte de la Chapelle ou la Porte d'Orléans, Paris possède aussi sa Porte de l'enfer. Une joyeuse bande de neuneus tentent de l'ouvrir et tombent dans les catacombes. Tant pis pour eux et pour nous!

Tant pis pour nous car c'est John Erick Dowdle qui réalise la chose! Réalisateur du remake américain de Rec, il filme donc avec ses pieds pour nous faire croire que l'on voit des vraies images retrouvées, qui reconstituent le mystère autour des catacombes de Paris! Le fameux principe du Found Footage qui ressemble de plus en plus à un cache misère pour productions fantastiques fauchées: foutage de gueule plutôt!

Mais pas de quoi s'énerver non plus: on enterre vite le film assez mauvais avec cette visite macabre du sous sol parisien qui ressemble au film des minutes à une promenade dans un train fantôme de la Foire du Trône. Ce que l'on retiendra, ce sont encore des anglo-saxons qui s'emparent de nos propres mythes.

Si Christophe Gans s'empare de la bête du Gévaudan, tous nos monstres et mythes locaux sont délaissés. A quand un film d'horreur sur l'ankou? Franchement, c'est sérieux! C'est ça aussi défendre notre identité culturelle. Même dans la série B! Au lieu de ça, on vient de nous ressusciter Clavier. Effectivement: qu'est ce qu'on a fait au bon dieu?

Bon c'est vrai que l'on s'emporte un peu donc parlons un peu de la bonne idée du film: filmer en gros plan, une très jolie actrice anglaise, Perdita Weeks. Croisement entre Christina Hendricks de la série Mad Men et notre Louise Bourgouin bien à nous, elle nous permet réellement de survivre aux dialogues complètement hallucinés et hallucinants ou les plans classiques du genre qui font sursauter plus grand monde. Pour cette bonne et unique raison, Catacombes mérite que vous vous enfermiez dans une salle obscure...

Avec Perdita Weeks, Ben Feldman, Edwin Hodge et Francois Civil - Universal - 20 aout 2014 - 1h30

Le Chant des Murmures

OUI L'ALBUM DE FREDDA EST PLUS QU'UNE REUSSITE! C'EST UN VRAI VOYAGE! UN HOMMAGE AUX VIEUX SONS AMERICAINS! UN TRAVERSEE DE L'AMERIQUE EN VERSION FRANCAISE! UNE OEUVRE SANS COMPROMIS, STYLISE MAIS PAS PRETENTIEUX!

Oui, on gueule un peu fort avec nos grandes lettres mais on y met du coeur et tous nos efforts car Le chant des murmures est un disque touchant et qui ne doit pas être vite oublié par la lourde actualité de la rentrée. Les médias vont tous répéter les mêmes choses sur les mêmes personnes qui vont créer l'événement à la rentrée. Ici, on va juste vous demander de jeter une oreille sur ce disque au raffinement rare.

Bizarrement, c'est au fin fond du Texas, peu célébré pour sa finesse, que Fredda a trouvé l'inspiration pour un disque délicat et habilement démodé. Lors du gros festival South By Southwest d'Austin, elle rencontre un amoureux français de la vieille Amérique, Sammy Decoster.

Elle travaillait déjà avec son compagnon, l'excellent Pascal Parisot. Elle collabore désormais avec le chanteur guitariste qui apporte tout son art du rock résolument vintage! Les nouvelles chansons de Fredda sont donc des petits objets ripolinés glissant sur une nostalgique jamais réactionnaire.

Fredda joue les fausses candides. Les textes sont simples et beaux mais la naïveté apparente cache une mélancolie qui est accentué par les instruments, semblant sortir d'un vieux disque de blues, d'une folk boisée ou d'un rock ancestral, influencé par les frontières du sud américain.

Ces influences sont à la mode mais Fredda ajoute un supplément d'âme avec cette voix gracile, qui vogue sur une belle tristesse. Le Chant des Murmures nous fait visiter l'Amérique avec une sensibilité bien française. C'est le beau tour de force de Fredda. Dans le pays de l'antiaméricanisme facile, c'est même un exploit. Franchement: DECOUVREZ LA!

Qui joue avec John Mellencamp?

Les Combattants

Il  y a la crise et le chômage. Arnaud aime particulièrement sortir avec ses amis. Rigoler. Glander au bord de l’eau. Il pourrait peut être travailler dans l'entreprise familial mais il est encore à l'âge des possibles. Un peu paumé. Un peu con. Un peu naïf. Un peu rêveur.

Un adulte naissant qui va rencontrer Madeleine (épatante Adèle Haenel) qui veut elle absolument faire l'armée. Elle envisage le pire. Pour elle, la fin du Monde est proche et il faut à tout prix se préparer. Son regard est dur. Elle est tendue. Toujours sous tension, son agressivité impressionne. Sa féminité bien est cachée mais Arnaud n'est pas insensible à cette drôle de "survivaliste"…

Deux âmes en peine qui vont se découvrir et se dompter! Le récit n'est pas nouveau mais il a le mérite de conjuguer tout ce que l'on peut aimer dans les premiers films français. Une fantaisie. Ou une liberté. Que cherche autant le réalisateur que les deux personnages centraux des Combattants.

Chacun à leur manière, ils luttent en effet contre le catastrophisme, les galères et surtout l'ennui qui devient de plus en plus existentiel. Tout est raconté avec une légèreté agréable et lumineuse. C'est un film qui se passe au bord de la mer... les chemins de traverse y sont nombreux et Thomas Cailley s'y aventure avec un vrai plaisir de la découverte. Le cinéma est une affaire de sensations.

Il arrive avec une facilité déconcertante à nous replonger dans les premiers émois, le passage à l'âge adulte, l'incompréhension et les doutes. Pourtant le film est une comédie qui refuse toute démonstration. Avec son extravagance et sa délicatesse, le film est une histoire d'amour, atypique, drôle et sensible.

Pour Cailley, l'amour est une guerre, une fuite, une alliance avant de devenir une réalité pour les deux protagonistes de ce petit film culotté, qui fait du bien au coeur et à la tête. Il semble partir un peu dans tous les sens, un peu perdus comme Madeleine et Arnaud. Mais derrière cette fougue, il y a des vérités qui ressortent. Une belle leçon. Un probable beau souvenir de cinéma !

Avec Adèle Hanael, Kevin Azais, William Lebghil et Brigitte Rouan - Haut et court - 20 août 2014 - 1h30

Un pour Deux

unprdeuxLe  roman de Martin Winckler n’est pas résumable, il part dans beaucoup de directions et on les suit toutes avec intérêt. Le livre ne se lit pas, il se dévore.

La collection Interstices chez Calmann-Lévy a vraiment le don d’éditer des livres originaux et qui sortent à chaque ligne des sentiers battus. Un pour deux, le dernier roman de Martin Winckler ne fait pas exception à la règle et c’est tout à l’honneur de cette collection, à l’heure où l’on a tendance à répliquer les recettes qui ont déjà fait leurs preuves.

Martin Winckler est connu à la fois comme l’auteur de La maladie de Sachs (prix du Livre Inter en 1998) et comme amateur érudit de séries télévisées. Alain Carrazé et lui, ont beaucoup œuvré pour qu’on prenne en France, conscience du fait que la vitalité artistique était du côté d’Oz, de New York Law and Order sans parler desSopranos et de Six feet under. Martin Winckler est également un médecin courageux, qui faisait des chroniques matinales sur France Inter et s’est retrouvé tricard parce qu’il s’était attaqué aux lobbies pharmaceutiques.

Bref Martin Winckler (c’est un pseudo) est quelqu’un qui n’aime pas rentrer dans une case et qui a plusieurs cordes à son arc. Un pour deux est le premier volet d’une trilogie.

Dans ce premier opus, on retrouve toutes les passions de l’auteur, à savoir : le goût des intrigues policières, des ambiances étranges et des personnages décalés, le regard d’un humaniste sur les dérives d’une société et notamment au niveau médical. La science-fiction et le fantastique sont traités comme des moyens permettant de décrypter ce qui se passe dans notre société actuelle et que nous ne savons pas voir.

L’histoire se passe en 2010, dans une grande ville du centre de la France, Tourmens. Le maire de la ville est un homme de petite taille marié à un mannequin connu. C’est un obsédé des Etats-Unis et de la télésurveillance.

Le mannequin connu Clara Massima fait appel aux services d’une agence de sécurité tenue par deux jumeaux au même prénom, René et Renée, spécialistes d’escorte et de sécurité rapprochée au doux nom de Twain Peeks. S’ensuit une ténébreuse affaire où les lobbies pharmaceutiques n’ont pas le beau rôle.

Mais le plus intriguant, c’est le mystère que cachent les deux jumeaux à propos de leurs identités. Mystère qui rapproche Martin Winckler de La quatrième dimension.

Ajoutons à cela qu’à une époque où les écrivains font du style comme d’autres de la mauvaise graisse, il est rafraichissant pour l’esprit que Winckler se contente de raconter son histoire abracadabrante et stimulante dans la plus grande sobriété.

Tout ça pour dire que si Alexandre Jardin ou Marc Levy vous font kiffer et vous donnent de bonnes vibrations, Un pour deux de Martin Winckler risque de vous filer un électrochoc salvateur.

280 pages - Calmann Levy

Les Gardiens de la Galaxie

Un monstre végétal, une tueuse toute verte, un rongeur énervé, une brute épaisse et un nostalgique des années 80, voilà ce qu’il faut pour pervertir joyeusement la charte trop rigide de Marvel.

Chez Marvel, il vous faut donc un super héros. Une nénette un peu timorée mais courageuse. Le monde à sauver. Des punchlines efficaces. Des explosions toutes les dix minutes. Et si possible, un méchant charismatique !

Depuis Spider-Man ou Iron Man, Marvel, aidé et racheté par Disney, a construit brillamment son propre studio pour que des types aux pouvoirs extraordinaires viennent nous sauver des extraterrestres, des terroristes, de la fin du monde, des néo conservateurs, des invasions venues d’ailleurs ou de monstres belliqueux.

Depuis Iron Man, les costumes changent mais les répétitions s’accumulent. On s’ennuie malgré les efforts pyrotechniques et les nombreuses invraisemblances parfois marrantes, souvent irritantes. C’est pourquoi Les Gardiens de la Galaxie nous vengent un peu de ce bazar bruyant coloré et commercial qui secoue le box office depuis plus d'une décennie!

James Gunn, réalisateur de séries B indépendantes et amoureux des années 80, se retrouve donc à faire la révolution avec un croisement improbable de Star Trek et de Breakfast Club. Dans la forme, c’est de la vraie sf avec des aliens qui parlent tous anglais dans toutes voies lactées. Dans le fond, c’est tendre comme le cœur d’un adolescent avec un couplet naïf et agréable sur le fait d’avoir des copains. Cette bande de héros ce sont les Bisounours de l’espace !

Mais ils ont une bonne gueule. Des hors la loi assez originaux, qui volent dans l’univers après un caillou rose qui peut détruire une planète qui ressemble à un centre commercial géant et qui déplaît fortement à un balèze bleu qui n’est pas le schtroumpf costaud ! 

James Gunn trouve un ton un peu différent des autres productions Marvel. Gunn ne prend pas son spectacle pour une machine à faire rentrer les dollars. L'absence de cynisme est évidente. Ca change donc ca fait du bien. Il fait souffler un vent pop et référentiel. C’est simple, sympa et sans bavure. On peut même y trouver quelques pointes de poésie. Un bon blockbuster à siroter durant l’été !

Avec Chris Pratt, Zoe Saldana, Dave Bautista et Lee Pace - Marvel - 16 aout 2014 - 2h02

Qui fait les yeux doux à Savage Garden?

Le Rôle de ma Vie

Deux films en dix ans! Inimitable JD dans la série Scrubs, Zach Braff avait surpris tout le monde avec son film Garden State, sensible et drôle en 2004. Une décennie plus tard, il sort enfin son second essai: une comédie personnelle, sensible et drôle.

Le Rôle de ma Vie est inattaquable. Ce qui rend le film aussi attachant qu'agaçant. L'acteur et réalisateur se raconte avec un sentimentalisme élégant, très californien donc plutôt agréable à regarder. Comme un bon copain, il se pose des questions. Il n'a pas forcément de réponse mais chronique assez bien la vie, l'amour et les emmerdes.

Zach Braff joue donc Aidan, un acteur raté, un papa à la ramasse et un fils peu prodigue. Couvé par sa femme bienveillante, Aidan découvre que son père est atteint d'un cancer en phase terminale. Cet événement va bien évidemment changer sa vision du monde qui l'entoure, de ce qu'il est et de ce qu'il veut. Va t il comprendre qu'elle est le rôle de sa vie?

Disciple de Woody Allen, Zach Braff est une version jeune et branchée du New Yorkais binoclard. La religion lui donne des boutons. Et un certain réconfort. Le rapport familial n'existe que sous forme de conflit. Les autres, c'est l'enfer (l'histoire entre la femme d'Aidan et son entreprise mérite un film à lui tout seul). Les angoisses existentielles s'expriment dans des dialogues ciselés et des vannes poilantes. Comme le père malade le suggère: "à la fin, il reste l'humour".

Une philosophie de vie se dessine. Très moderne, Zach Braff respecte un discours formaté mais charmant à voir et entendre. On a un peu peur au début par les tics du ciné indépendant américain mais l'auteur a une capacité hors du commun à se rendre sympathique. On se sent proche de lui et tous ses travers.

Aidé par des comédiens lumineux (merci de ne pas avoir pris des enfants cabotins têtes à claques), Zach Braff est le cinéaste ami, qui nous console, nous comprend et se marre avec nous. Autant de bonne volonté, ca ne se refuse pas: ca se savoure.

Avec Zach Braff, Kate Hudson, Joey King et Mandy Patinkin - Wild Bunch - 13 aout 2014 - 1h45

Foxtrot

C’était à une époque où il était de bon ton de mettre une chanson sur une face entière d’un 33 tours. Les expérimentations et les drogues ont étendu le rock sur la cire. Le jazz installe sa notion de durée à l'intérieur de la pop.

C’était à une période où l’on progressait avec des instruments dans des univers psychédéliques, imaginaires et littéraires. Les lectures sont devenues une source d'inspiration. Le rock fin 60 début 70 redonne une vitalité certaine aux univers chers à Tolkien. La culture anglaise s'invite chez les rockers. Le premier morceau de Foxtrot, Watcher in the skies est inspiré par les écrits d'Arthur C.Clarke, l'auteur de "2001 l'Odyssée de l'espace".

C’était à un moment magique où Phil Collins était bien coincé derrière sa batterie et éloigné des micros de Peter Gabriel.C’était un temps glorieux ou Genesis n’était pas cette machine à tubes ennuyeuse.

Foxtrot reste le meilleur disque du groupe mais aussi du genre. Une vraie aventure lyrique et exaltée. Pas besoin de porter une armure ou d'être haut perché pour apprécier le charme british et bavard de cet album.

Peter Gabriel et ses camarades font dans l’emphase sans être jamais dans la surenchère et l’énormité. L’écriture est intelligente, rebondissant entre l’élan symphonique et des moments apaisés.

Il y a une vraie cohérence dans les chansons qui nous amènent à ce morceau épique de 22 minutes et des poussières. Mais plutôt que de virer à la démonstration, cette chanson sert un univers qui rappelle Lewis Caroll, Shakespeare et Tolkien.

Comme un bon bouquin, Foxtrot réserve des surprises à chaque relecture. En tout cas, le disque est un bon moyen de se réconcilier avec le rock progressif, genre tombé rapidement dans la caricature et de redorer le blason sali de Genesis, groupe passionnant qui aurait dû disparaitre avec le départ de Peter Gabriel pour d'autres cieux...

Chroma

C'est un fidèle collaborateur de Miles Kane. Il est pote avec Alex Turner. Son carnet d'adresses est prestigieux. Il a bon goût. Il sait écrire de bonnes chansons. Pourtant Eugene McGuinness n'a pas le même destin glorieux que ses amis!

Son quatrième album a les qualités d'un disque britannique de notre époque. Il lorgne un peu sur les années 60 et joue sur un certain classicisme dans la réalisation. Il y a d'abord du style chez Eugene McGuinness. Il est un peu précieux mais son travail n'est pas bâclé.

L'orchestration est élégante. La production est léchée. Pourtant l'ennui pointe son nez. Il y a peut être un manque de charisme. Le chanteur est un peu condamnée à être un second couteau. Il n'y a pas vraiment de défaut dans son album mais peu d'éclat aussi!

Effectivement il fait penser à Jake Bugg ou Miles Kane mais en beaucoup moins bien. Il ne résiste pas du tout à la comparaison. Ses parents lui ont fait écouter les Kinks et les Beatles à haute dose. C'est cet héritage qui fait le charme du personnage. Il sait imiter le son faussement candide de ces prédécesseurs.

Mais il manque la petite flamme. C'est un dandy sans charme. On est un peu désolé pour lui mais sa place secondaire semble méritée. On attend beaucoup mieux de sa part. Il est peut être un peu trop anglais pour nous mais promis, on garde un oeil sur lui!

Domino - 2014

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