Art-scène, Spectacle comique, Théâtre

FELLAG – Bled Runner – Théâtre du Rond-Point

 

« Vous avez raté la colonisation, nous avons raté l’indépendance, on est quitte ! »

Fellag revient sur scène avec Bled Runner, un spectacle dans lequel il retrace avec finesse, dignité et humour un chemin autobiographique, de son « village aux 32 fusils » en Kabylie à son arrivée dans la capitale française.

Fellag est un talentueux conteur. Avec l’aide de Marianne Epin à la mise en scène, il revient sur son enfance en Kabylie avec l’œil d’un naïf au grand cœur. Les clichés sur les français tombent dans l’imaginaire d’un enfant qui les découvre noirs et musulmans avant de comprendre qu’il s’agit de tirailleurs sénégalais. L’arrivée de la radio est l’occasion pour sa mère de s’émanciper en musique avec les autres femmes du village et de goûter au pastis en l’absence du père. L’adolescence est l’occasion pour une jeunesse algérienne d’inventer le « murisme », l’art de voir passer le temps qui ne passe pas, dos au mur, « équivalent de notre existentialisme français ».

L’histoire, faite de contrastes et de chutes, provoque inévitablement les rires du public. La confrontation de la colonisation avec le peuple colonisé est décrite dans un climat apaisé pointant avec humour à la fois les dérives absurdes des fonctionnaires de l’administration française et les habitudes culturelles d’un peuple qui ne manque pas de trivialité dans Tous les algériens sont des mécaniciens.

Ces chroniques sociales et historiques du quotidien rappellent la plume d’un Dario Fo. Tout y est dit gentiment, avec générosité, humilité et fair-play mais tout est dit. Gégène, hélicoptère, général, attentat de St Michel, FLN, GIA, apprentissage de l’arabe littéraire, nos ancêtres les gaulois, indépendance, autochtones.

Avec ce point de vue interne exprimé avec une grande intelligence, Fellag parvient à rassembler un public autour d’une thématique complexe utilisée par d’autres aujourd’hui pour diviser. On en ressort apaisés, rassurés et remplis de gratitude. Oui il est possible d’avoir une communauté de langage, de se regarder droit dans les yeux et de rire du ridicule des uns et des autres. Une jolie parole politique qui fait simplement du bien.

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