Livres, Polar

Blood & sugar, Laura Shepherd-Robinson, Traduit par Pascale Haas, 10-18

A la fin du XVIIème siècle, l’esclavage et la canne à sucre font la fortune de l’Angleterre, et plus particulièrement de la ville de Deptford où un militaire mène l’enquête pour découvrir qui a torturé puis tué son meilleur ami. Ses investigations le mèneront sur la piste de marchands et d’armateurs qui s’enrichissent grâce au commerce d’êtres humains.

« Si vous espérez que cesse un jour l’esclavage, vous devrez jeter un sort au peuple anglais! Car il aime mettre du sucre à bas prix dans son thé tout comme du tabac à bas prix dans sa pipe. Aucune lamentation à ce sujet n’y changera rien!« 

« Nous sommes une nation d’hypocrites. C’est la triste réalité. Les gens ne cherchent pas à savoir comment leur sucre arrive réellement dans leur thé, car ils ne veulent pas le savoir« 

Il parait que Blood & Sugar est le thriller historique du moment. Il devrait donc ravir les amateurs du genre. Pour ma part, n’aimant ni les polars, ni les livres historiques, je n’aurais pas dû m’y risquer… Que voulez-vous, je suis curieux et toujours à la recherche d’une bonne surprise ; mais de bonne surprise il n’y eut pas pas pour cette fois. Dommage.

En se focalisant sur l’enquête menée par son personnage principal, l’autrice passe à mon avis totalement à côté de son sujet. En adoptant le point de vue, et la langue, d’un aristocrate, elle passe aussi littéralement, et littérairement, à côté de son sujet. Un peu comme si le magnifique film Twelve years a slave avait été raconté par un planteur plutôt que par un esclave.

Parce qu’il reste à hauteur d’hommes et se focalise sur la recherche du meurtrier, ce roman n’évoque que superficiellement le sujet de l’esclavage. Historiquement, l’intérêt du livre est donc assez limité. Littérairement, c’est une catastrophe. Laura Shepherd-Robinson a un ton ampoulé et mièvre. Tout est très bien expliqué, très didactique… mais pas très bien écrit. Si bien que, alors même que les meurtres sanglants se multiplient sur le passage du héros (le type est un vrai chat noir!), l’on n’est jamais ému.

« Nous arrivâmes à Londres un peu après huit heures. La lumière du couchant parait le dôme grandiose de Saint-Paul d’un éclat ambré, les clercs et les courtiers de la City rentraient chez eux ou cherchaient un endroit où dîner. Plus nous roulions vers l’ouest de Soho, plus les rues s’animaient, se remplissaient de gentilshommes noceurs accompagnés de leurs catins ».

« Londres baignait dans la lumière laiteuse du pâle soleil qui parvenait à percer le ciel d’étain maussade. Des prostituées et des pigeons se pavanaient en ébouriffant leurs plumes de temps à autre d’un air courroucé. Les vitrines des commerces du port renvoyaient des reflets noirs et dorés au gré du mouvement des nuages« .

Si elle n’avait pas à ce point usé d’adjectifs qualificatifs ni abusé de fausses pistes, peut-être l’écrivaine aurait-elle pu boucler son enquête en 300 pages plutôt qu’en 450. Peut-être alors le temps m’aurait-il paru moins long ; car il m’a vraiment fallu lutter pour terminer ce roman, même si je comprends très bien qu’il puisse trouver son public.

Blood & sugar
Laura Shepherd-Robinson
Traduction Pascale Haas
10-18 collection Grands-Détectives
453 pages

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