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« LES TONDUES », Perrine LE QUERREC, Jacques CAUDA

 

La quatrième de couverture donne le « la » époumoné de ces « Tondues » à qui l’écrivaine Perrine Le Querrec lègue ses mots et le peintre Jacques Cauda son crayon à dessin. « N’a-t-on jamais demandé aux hommes s’ils avaient couché avec une allemande, les a-ton transbahutés sur des charrettes à travers villes et villages sous les huées ? A-t-on jugé leur sexualité, a-ton jugé leur chair, leur pénis, leur cœur ? »
Ceux qui se targuaient de clamer hier « Je suis Charlie », auront-ils le cran (sic) de clamer aujourd’hui « Je suis tondu » ? A défaut de tignasse, je n’en mettrais pas ma main à couper, mais qu’importe…

En un peu plus de trente pages courageuses (merci aussi à l’éditeur Z4), un épisode sinistre de l’histoire de France passe la mémoire enfouie des hommes à la Marie-Rose pour rendre moins lisse le crâne de l’infamie.

En même temps que tombent les chevelures tombent les masques des maîtres de l’exemplarité et rebondit le destin des femmes à travers les siècles. Le duo Le Querrec / Cauda scalpe au sécateur le non dit intemporel des outrages faits au « sexe faible ». Quand l’une écrit avec le vif de ses entrailles, l’autre fomente ses noirs dessins. Perrine s’exprime en urgentiste, Jacques décolore le trait. A chacun, chacune, sa partition dans un témoignage essentiel : donner à entendre pour effacer le silence de la langue, donner à voir pour gommer le silence des yeux. « Le silence des femmes. Ce silence de la peur de la honte un silence séculaire la langue mordue la tête tondue. Silence reste à ta place attends mon retour attends ton tour sur la ligne brisée de ton départ sans espoir d’arrivée. Et les cheveux tombent et les femmes tombent et la raison tombe et l’humanité tombe et je tombe le corps attaqué au sommet ».

A l’heure où les extrémismes de tout poil font sortir du bois la bête du totalitarisme, Perrine Le Querrec et Jacques Cauda nous appellent à bien plus que la vigilance, ils crient la rage de résister et le refus du laisser-faire. Leur crédo universel renvoie dos à dos le dévoiement des religions alibis de l’horreur, le diktat sexuel, le plaisir trouble du bourreau face à sa victime, l’oppression originelle du fort sur la faible.

« L’ennemi est désigné c’est l’ennemie, la femme c’est l’ennemie la faute le trouble l’incendie les bombes la menace. La chevelure c’est l’ennemie. Baudelaire. La poésie. La liberté. La sensualité. L’être profond. Les violences varient. Les violences spécifiques. A coups de ciseaux à coups de fouet à coups de pierre à coups d’acide à coups de rasoir à coups d’insultes à coups de verges. »

Loin des philosophes bénis oui-oui habiles à couper en quatre les cheveux de la réalité pour légitimer le déni, à contre courant des castes revanchardes pseudo-féministes, ce livre va au-delà de la demande d’égalité des sexes. Il est un vibrant plaidoyer pour le respect du « moi » de la femme, son essence et son intégrité, dusse-t-il en coûter aux hommes le partage du pouvoir qui va avec, et le vertige de la peur qui change de camp.

« Nous sommes métisses / Nous sommes l’épouvante et la puissance / L’utopie et la faille / L’inégalité flagrante vivante souffrante vibrante rayonnante / Nous sommes une bouche le langage – des seins un cœur- des bras l’étreinte – des cuisses la force – des yeux la perception – deux cerveaux l’intelligence – un sexe la vie / Une chevelure / Une femme. »

« Les Tondues » Z4 Editions. 12 euros.

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