Art-scène, Théâtre

Mon pays, ma peau – L. Schuster – D. Koma, R. Bohringer – Théâtre Le Lucernaire

De la vérité, de la réconciliation et de l’espoir

Mon pays ma peau est une adaptation théâtrale de Country of my skull écrit par la journaliste Antjie Krog, un livre hybride sur le fond et la forme qui s’appuie sur des reportages réalisés en Afrique du Sud, lors de la Commission Vérité et Réconciliation instaurée par Nelson Mandela lors de son arrivée au pouvoir en 1995. Cette commission de justice restaurative, historique, dura 2 ans, de 1996 à 1998.

Sur scène, une grande table, deux chaises, une radio qui diffuse de temps en temps des témoignages, un micro, et un néon qui surplombe la table. Diouc Koma interprète tour à tour les différents acteurs clefs de la Commission, Romane Bohringer, la journaliste Antjie Krog.

Avec peu d’éléments scéniques et une modalité frontale, la mise en scène choisit résolument de laisser reposer l’attention du spectateur sur l’écoute du récit joué, lu et interprété par les comédiens dans une forme épurée mais généreuse. La lecture-spectacle est découpée en tableaux calqués en partie sur le modèle de Kubler-Ross qui a travaillé sur les différentes étapes du deuil, du déni à la colère, en passant par la négociation, la dépression, jusqu’à l’acceptation. Un cheminement de la pensée vers la réconciliation pour un peuple et pour soi-même.

L’adaptation revient entre autres sur le rôle déterminant de Mgr Desmond Tutu, prix Nobel, disparu dernièrement, icône de la lutte contre l’Apartheid. On prend dès lors plaisir à écouter un texte qui met en valeur les droits de l’homme dans un contexte politique pourtant houleux et complexe. On mesure alors l’écart entre le prescrit, la recherche d’idéal, et la réalité vécue. Comment réconcilier un peuple ségrégé durant tant d’années ? Comment installer une justice restaurative et introduire l’idée d’amnistie pour des actes criminels traumatiques ? Comment fusionner le passé avec le présent pour construire un nouvel avenir ?

Ce retour sur un moment clef de l’histoire de l’Afrique du Sud fait écho avec le cheminement de la pensée de la journaliste mais sans aucun doute avec notre contemporanéité et nos sociétés tentées par le repli sur soi et un individualisme identitaire forcené qui oublie notre socle de valeurs universelles. Il suffit d’écouter ce texte pour le comprendre. Le texte agit comme un rappel au bon sens. Pacificateur, il démontre que ce qui nous rassemble est résolument plus fort que ce qui nous divise et que l’unité est toujours possible lorsque le politique a le courage d’engager un travail de fond, aussi difficile soit-il. En somme, un message rassurant porté vers l’espoir du lendemain qui se déjoue des peurs. Et en ce moment, que cela fait du bien !…

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