Je n’ai jamais aimé le football. Parce que je suis un animal social, je fais semblant de m’intéresser au championnat de France, à la ligue des Champions ou la Coupe du Monde mais depuis mes 7 ans, je n’aime pas le foot. Parce que j’ai voulu joué au football avec des petits camarades. Parce que j’ai eu un entraîneur qui nous engueulait en permanence. Parce que jouer au ballon n’était plus un truc rigolo.
Au même âge, j’ai été marqué par la vision d’un de mes premiers films d’horreurs, L’amie Mortelle, diffusé sur feu La Cinq. Je me souviens particulièrement d’une scène où, avec un ballon, une jeune fille éclate la tête d’une vieille rombière. Un sort qu’aurait mérité ce pauvre type qui hurlait sur une bande de gamins qui ne voulait pas être les nouveaux Platini!
C’est comme cela que j’ai découvert Wes Craven, le type qui allait nourrir mes cauchemars de pré adolescent et de grand ado attardé. Jusqu’en 1984, il n’était qu’un auteur de films fauchés et cultes à cause de leur violence et leur ambiguïté. C’est grâce aux Griffes de la Nuit qu’il devient un « petit maître de l’horreur ».
A cause de lui, mes rêves sont hantés par le charismatique Freddy Krueger. Avec Jason, le mort vivant mongoloïde des Vendredi 13, je trouve mes pères fouettards les plus réjouissants et les plus actifs. Le cinéma c’est ma passion, mon rêve. Ce songe, pour Wes Craven, est mortel, inquiétant et extrêmement jouissif.
Il vient de nous quitter mais je ne peux ici que le remercier d’avoir nourri mon imagination, sa partie sombre. Combien de fois j’ai dessiné le griffu de la saga des Freddy durant des cours ennuyeux? Combien de fois j’ai attendu la sortie de ses films? Combien de fois j’ai tenté de voir des longs métrages interdits au moins de treize ans?
Wes Craven est lié intimement au slasher pour avoir ensuite détricoté le genre qu’il lui a donné les clefs du succès. Certaines personnes lui en veulent pour cela. Avec Freddy sort de la nuit puis la saga horrifique de Scream, Craven prouvait qu’il avait lui aussi grandi. En même temps que moi. Au fil de sa carrière, il a mis de plus en plus de matière dans ses séries B, avec des monstres impressionnants mais aussi des thèmes qui en disaient plus sur la société. Sa filmo m’accompagnait dans ma vie et mes petits plaisirs de navets.
Parmi mes cauchemars d’enfants, je revois les angoisses morbides de l’Emprise des ténèbres, l’aspect pop eighties de Shocker ou les enfants du Sous sol de la Peur. Avec les Scream, j’ai compris la perversité du cinéma, le plaisir d’un spectacle sanglant et l’importance du second degré, dans les films et surtout la vie!
Wes Craven semblait un peu blasé par le genre qu’il défendait avec plus ou moins d’inspiration. Un peu comme moi. On finit toujours par se lasser de ses amours de jeunesse. Pourtant il y revenait toujours. De plus en plus mainstream, son cinéma a expliqué les rouages de la peur et les secrets du cinéma d’horreur
Je ne sais pas si son cinéma est passionnant mais il a toujours été là pour moi. Wes Craven, c’est une version sombre et un peu moins talentueuse de Steven Spielberg. Il a mis en scène mes terreurs et mes vertiges. Il m’a ébloui. Il m’a déçu (Le type avait un goût certain pour le dollar facile). IL a toujours été là. Et grâce à lui, j’ai laissé le foot à ceux qui n’ont pas beaucoup d’imagination.