Art-scène, Musical, Théâtre

Chamonix – 26 000 couverts – P. Nicolle – G. Rassov – Théâtre du Rond-Point

On salue l’audace de cette production qui apporte de la légèreté et beaucoup d’autodérision sur l’homme et sa finitude dans une société qui n’a de cesse que de se prendre au sérieux sans se soucier réellement de ce qui le mènera à sa perte. On sourit. On rit. Un Objet Théâtral Non Identifié à découvrir en famille qui assouplit les zygomatiques !
On sourit. On rit. Un Objet Théâtral Non Identifié à découvrir en famille qui assouplit les zygomatiques !

L’art de l’extravagance et de l’auto-dérision

La Compagnie 26 000 couverts est de retour avec Chamonix sur la grande scène du Théâtre du Rond-Point. Chamonix est une parodie d’exploration spatiale racontant l’histoire d’un équipage de terriens revenus sur la planète bleue après 4 000 ans de voyage intergalactique. La Terre est désormais dominée par une larve extra-terrestre vivant dans l’intra-monde. La larve pose une question existentielle : faut-il redonner une chance à l’humanité de repeupler la planète après l’avoir saccagée ou pratiquer sur elle le « suppositage » ?

Dans la grande tradition de l’humour français digne des Nuls et d’Objectif Lune au siècle dernier, la Compagnie présente une farce haute en couleur agrémentée de chansons et de textes aussi absurdes les uns que les autres. À la manière des opérettes ou des opéras-bouffons qui parodiaient les opéras pour chercher à faire rire le public, dans cette fantaisie burlesque, la Compagnie s’amuse à tordre en musique les clichés cinématographiques de science-fiction en les théâtralisant et en se jouant avec efficacité des codes théâtraux : oubli de sorties de scène, sortie de jeu des comédiens, comique de répétition.

La force de la représentation tient dans l’énergie collective déployée par la troupe, une scénographie de qualité en cohérence avec le comique recherché – dans la démesure –  et un comique de mots fondé sur une novlangue dégradée de la langue française : erreurs de syntaxe, de conjugaison, mots coupés. Le travail d’écriture de Gabor Rassov et Philippe Nicolle suffit à lui-seul à projeter un imaginaire comique. Une manière de se moquer avec autodérision des dérives de la simplification de la langue qui finit par ne se réduire qu’à quelques mots, jusqu’à l’absurde. Un babillage régressif.

Très rapidement le spectateur se retrouve embarqué dans ce monde coloré de l’absurde très enfantin qui joue avec grande liberté de références et jeux de mots artistiques. Très drôle scène d’atterrissage, jeu remarquable d’Ingrid Strelkoff dans le cyborg Sophie, amusant Buffet-voyageur-dans-le-temps au nom de Bernard s’exprimant au travers du portrait de Clown de Bernard Buffet, ignoble larve à la voix proche de l’Empereur de Star Wars, costumes délirants de spationaute orange rappelant Tintin. Un jusqu’au-boutisme théâtral qui finit par créer une forme picturale et poétique de l’absurde.

On salue l’audace de cette production qui apporte de la légèreté et beaucoup d’autodérision sur l’homme et sa finitude dans une société qui n’a de cesse que de se prendre au sérieux sur de très nombreux sujets sans se soucier réellement de ce qui le mènera à sa perte. Une mise en abîme finalement malheureusement assez réaliste… On sourit. On rit. Un Objet Théâtral Non Identifié à découvrir en famille qui assouplit les zygomatiques.

Chamonix – Théâtre du Rond-Point Paris (theatredurondpoint.fr)

Dates de tournée : 12 et 13 janvier 2024 Points Communs — Scène Nationale Cergy-Pontoise (95) // 19 et 20 janvier 2024 TAM — Rueil-Malmaison (92) // 1er et 2 février 2024 MARS — Mons (Belgique)

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