La Dame de Monte-Carlo : Une femme vient de perdre sa fortune au casino. Elle décide de se suicider en se noyant dans la Méditerranée.
La voix humaine :
Seule, dans une chambre, une femme téléphone à son amant qui lui annonce leur rupture et son intention d’en épouser une autre. Dévastée par le chagrin, elle se raccroche au téléphone, coupé par des interférences extérieures.
Un seul personnage, un long monologue, pas d’action. A peine une suite de phrases, parfois inachevées, entrecoupées de cris, et au cours desquelles l’essentiel n’est jamais dit : en un mot, un langage téléphonique, mais d’une incroyable force dramatique. L’arrière-fond est quant à lui psychologique, émotionnel et affectif. Aussi, traduire musicalement tout ce que les paroles dissimulent, c’est certainement ce qui séduit autant le spectateur. Cette tragédie lyrique est magistralement mise en scène et orchestrée. C’est une suite de séquences, de phrases : il y a celle du souvenir, celle du mensonge, celle du suicide manqué. Jean-Christophe Rigaud ponctue chacune de ces phrases comme des segments musicaux ayant chacun sa personnalité propre. L’œuvre baigne dans une atmosphère intense et lyrique. L’interprétation de Caroline Casadesus exprime toute la force du texte et de ces phrases, exacerbant à la fois le pathétique et le déchirant de ce monologue.
À travers les non-dits et un moyen de communication défaillant, la pièce présente une rupture amoureuse difficile, dans laquelle le téléphone devient le protagoniste d’un drame sentimental. Comment réussir à maintenir l’intérêt durant ce long monologue d’une femme délaissée par son amant qu’elle essaie de reconquérir dans une conversation téléphonique perturbée par des incidents techniques ? Jean-Christophe Rigaud laisse la voix à découvert.
Aussi, le piano assure le rôle de l’amant absent en suggérant la teneur de ses réponses qui ponctuent le récitatif tourmenté de l’héroïne :
La sonnette du téléphone retentit. Elle lui raconte sa soirée de la veille, son mal de tête, son déjeuner, ses courses. Il fait mine de raccrocher mais elle continue, lui indique qu’il peut venir chercher ses affaires quand il le souhaite, l’empêche de s’excuser. Elle endosse « C’est moi qui suis stupide » et le couvre de compliments, « Tu es gentil », « Je ne me croyais pas si forte » et se défend de jouer la comédie, de prendre sur elle. « Je n’ai pas la voix d’une personne qui cache quelque chose ». « J’ai décidé d’avoir du courage, j’ai ce que je mérite », « Tout est ma faute ». La ligne ne fonctionne plus, « C’est drôle parce que moi, je t’entends comme si tu étais dans la chambre…Allô, Allô ! (…) Allons bon maintenant, c’est moi qui ne t’entends plus, si mais très loin, très loin, (…) J’entends mieux que tout à l’heure…(…) On dirait que ce n’est pas ton appareil ».
La mélodie épouse toutes les émotions qui déchirent l’héroïne : l’amour, la haine, le désespoir, les regrets.
Laissez-vous emporter dans ce tourbillon lyrique et déconcertant par sa force et par le charme cruel du duo formé par Caroline Casadesus et Jean-Christophe Rigaud.
La Voix humaine précédée de La Dame de Monte-Carlo
Représentations les lundis du 30 mai au 11 juillet 2016 à 20h30 (durée 1h15)
Théâtre de Poche Montparnasse
LA VOIX HUMAINE : Tragédie lyrique de Francis Poulenc d’après la pièce de Jean Cocteau (1958) précédée par LA DAME DE MONTE-CARLO, monologue pour soprano de Francis Poulenc sur un texte de Jean Cocteau (1961).
Mise en scène : Juliette Mailhe
Avec : Caroline Casadesus
Pianiste : Jean-Christophe Rigaud