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La guerre des jours lointains

Eté au Japon. À l’issue de la Deuxième Guerre Mondiale, Takuya Kiyohara apprend par un ami fidèle qu’il est recherché par les forces américaines pour être jugé et très probablement condamné à mort.

Il entame alors une fuite, une cavale paradoxalement lente et presque sereine, à travers le Japon. Ce sera pour lui l’occasion d’un double cheminement : géographique (à travers des paysages ravagés par les bombardements et marqués par la faim) et intérieur (pour apprendre à composer avec son passé d’exécuteur).

Pendant la guerre, Takuya servait dans la surveillance anti-aérienne et l’auteur – Akira Yoshimura – adopte une écriture posée, lente et pleine de détails d’une rigueur mathématique sur le nombre d’avions, leur heure précise de passage ou encore le tonnage de bombes larguées pour suggérer que son personnage considère les bombardiers B29 américains comme de simples points entrant sur l’écran de son radar avant d’en disparaître.

Jusqu’au jour où, sortant de son bunker, après une attaque ennemie, Takuya voit de ses yeux les dégâts et la ville dévastée ; il prend alors conscience de l’horreur des bombardements.

Quelque temps après, lorsqu’il sera face à des prisonniers américains – ces grands hommes occidentaux, à la stature imposante nécessitant une nourriture riche et abondante alors que la population manque de tout – il jugera naturel qu’ils soient exécutés. Leur mort lui paraît logique au vu des horreurs qu’ils ont commises et considérant le peu de respect qu’ils ont eu pour les victimes ; certains n’ont-ils pas avoué avoir regardé des photos de filles nues et écouté du rock sur le chemin du retour ?

Takuya trouvera donc absolument normal, lorsque l’occasion se présentera à lui, de participer à l’exécution de prisonniers américains et d’en décapiter un lui-même.

Mais la guerre est désormais finie, et s’il continue de trouver son acte patriotique (voire héroïque), des étrangers prétendent lui demander d’en répondre alors qu’ils ne sont pas à même de le comprendre.

« Un lieutenant de l’armée de terre (…) avait mis au secret un prisonnier américain du nom de Hard pour tentative d’évasion, et celui-ci ayant à nouveau tenté de s’enfuir à trois reprises, il l’avait roué de coups jusqu’à ce que mort s’ensuive. Le Tribunal militaire, considérant que frapper quelqu’un était un acte de brutalité, avait condamné l’accusé à la pendaison. Dans l’armée japonaise, les coups étaient quotidiens, et l’on pensait que c’était plutôt une preuve de clémence de les infliger à un prisonnier récidiviste et Takuya avait reçu un choc en apprenant tout cela ».

Son errance lui fera pourtant progressivement prendre conscience de ce que la guerre est une époque désormais quasiment révolue.

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