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Une Epoque Formidable

Un drôle de roman qui ne raconte pas d’histoire de manière linéaire. Il agace autant qu’il intéresse. On a envie d’en arrêter la lecture mais on y revient parce que quelque chose d’indicible retient l’attention…

En fait, c’est un roman qui intéressera tous les hommes et les femmes qui travaillent ou qui ont travaillé en entreprise, ce qui fait pas mal de monde. Ils y trouveront un portrait au vitriol des relations de bureau et de l’aspect vampirique du travail : on se croit plus fort que l’emploi qu’on occupe. Mais cet emploi vous ronge peu à peu et il faut bien avouer que beaucoup de gens n’ont pas d’existence valable en dehors de leur travail. Même et surtout s’ils cherchent à s’en échapper.

Telle est la conclusion qui s’impose au narrateur, cadre sans véritable fonction. Il se trouve dans un train de banlieue arrivant à Londres. Il fait beau et il se rend compte qu’il a envie d’éprouver sa liberté et de ne pas aller travailler. Le ciel est si bleu et le temps plein de promesses. Il repense au premier poste qu’il a occupé, aux personnes qu’il y a croisé. Son meilleur ami Paul, intelligent et alcoolique… Ce long préambule aboutit donc à cette révélation : après avoir inventé un bobard et téléphoné à sa supérieure en prétextant une maladie, il part se promener. Mais le plaisir a disparu et, esclave du travail, il ne peut lui échapper.

Michael Bracewell, écrivain anglais d’une quarantaine d’années, serait une sorte de Michel Houellebecq dans sa description sans concession de la misère humaine actuelle. Un Houellebecq qui s’abstiendrait de parler de cul parce que le monde est suffisamment minable sans en rajouter avec une description clinique des parties intimes.

On attend avec impatience que d’autres de ses romans soient publiés, pour juger de l’œuvre dans son ensemble. Ce que l’on peut dire, pour l’instant, est qu’il s’agit d’un écrivain déroutant. J’aime la froideur entomologiste de ses descriptions (notamment la pause déjeuner du narrateur, où il furète dans un grand magasin en évitant de croiser ses collègues). J’aime nettement moins sa tendance à l’abstraction qui fait décrocher le lecteur.

Saluons cependant l’effort des Editions du Dilettante (Eric Holder, Anna Gavalda, Vincent Ravalec) qui publient un roman étranger. Ce qui est rare et appréciable. Le Livre de poche a pris le relais depuis!

154 pages – Livre de Poche

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