Cinéma

Girl

Caméra d’or à Cannes, Girl déstabilise, passionne et questionne… Loin de la leçon démonstrative, ce film belge est une étude séche sur un personnage mystérieux.

Car Lara s’appelait avant Victor. Elle est jeune. Elle voudrait être danseuse étoile. Elle travaille dur pour y arriver. Elle a un père compatissant et un petit frère espiègle. Cela pourrait suffir à son bonheur. Mais l’adolescence et l’importance des hormones vont détraquer le précaire équilibre de cette jeune femme en devenir…

Transexuelle, cette adolescente a bien les soucis de son âge. L’acceptation de son corps. Les premiers émois. Les amitiés compliquées. L’identité et l’avenir. Avec un problème supplémentaire que le réalisateur Lukas Dhont ne veut pas porter comme un dossier sociétal.

Bien au contraire, il colle au combat discret de Lara. Il suit ses efforts colossaux. Il observe ses blessures physiques. Il révèle ses secrets qu’elle refuse elle même d’avouer à un père héroïque, donnant tout pour que sa fille soit tout simplement comme les autres. C’est ce rapport qui est peut être le plus touchant dans ce film organique, vibrant et terriblement humaniste.

Il n’y a pas de misérabilisme. C’est l’observation pure et dure. Les sentiments finissent par transparaitre petit à petit. La jeune fille grandit dans un corps qui n’est pas habituel. Pourtant c’est bien un récit d’apprentissage et d’émancipation qui va jusqu’au corps. Un cinéaste vénérable comme David Cronenberg serait jaloux du travail du cinéaste belge qui fait du corps, un vrai sujet de cinéma, d’ambiguité et d’interrogations.

Le point de vue est juste. Lukas Dhont est à bonne distance pour nous faire plonger dans la profondeur existentielle de l’âge adolescent. Plutot que les scènes chocs (il y en a), le cinéaste joue sur la pudeur, le calme et le naturalisme pour observer la tempête qui couve dans le corps malmené de Lara.

Ca pourrait être le film bête à festival, fait pour cartonner sur les listes de lauréats mais il y a une description subtile et belle de l’humanité, de la famille et de l’individu qui rassure. Elle nous console de quelques longueurs. Mais il ne faut pas bouder notre plaisir: c’est bel et bien du cinéma. Pas du documentaire. Mais de l’art, de la fiction qui vient titiller nos réalités.

Avec Victor Polster, Arieh Worthalter, Oliver Bodart et Tijmen Govaerts – Diaphana distribution – 10 octobre 2018 – 1h45

Previous ArticleNext Article

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

? * Le temps imparti est dépassé. Merci de saisir de nouveau le CAPTCHA.