Art-scène, Théâtre

Père

On en frissonne!

Quoi de mieux que le thriller psychologique d’August Strindberg et la Comédie Française pour garantir à Arnaud Desplechin un début théâtral réussi?

Car le texte de « Père », tout d’abord, est une merveille de justesse sur la complexité et la fragilité des relations amoureuses et familiales. L’histoire de ces parents divisés au sujet de l’éducation de leur fille et prêts à tout pour arriver à leurs fins, sonne si vrai et si puissamment qu’on en frissonne.

On est tellement affecté par cette mère, complètement démunie puisque la loi la prive de tout pouvoir de décider pour son enfant, qu’on se surprend à comprendre et à justifier sa malice et sa perversité, quand elle decide d’insinuer le doute de la paternité. Et une fois la machine infernale du doute lancée, on assiste effrayés à la chute du père, qui semble irréversible.

On admire ensuite l’immense attention portée par Arnaud Desplechin à préserver de la douceur et de la tendresse entre ses personnages, surtout dans leurs moments les plus cruels. Car on est d’autant plus glacés par la violence, la cruauté des échanges, qu’ils sont calmement et amoureusement exprimés.

Entre les mots, d’une violence inouïe, de la mère (Anne Kessler) et la fragilité que tout son être exprime, le contraste est saisissant, effrayant. Le père (Michel Vuillermoz) est tout aussi touchant, admirable. Lui qui devrait détenir tous les pouvoirs en tant que père et maître de maison, se révèle rapidement le plus faible, usé par la puissance des femmes et leur ténacité.

Emporté par le souffle criminel du doute, il chavire progressivement vers la folie et ceci à une vitesse folle, comme une fatalité, et on a froid dans le dos de voir la spirale avancer, la paranoïa s’installer, la rapidité, la facilité ou l’esprit et la raison sont dévorés.

Enfin, le décor, sobre et pesant, d’une bibliothèque, dans ce qu’on imagine une immense maison de campagne et où chaque âme semble porter son lot de névroses, accompagne parfaitement le drame.

Père d’August Strindberg
Mis en scène par Arnaud Desplechin
Jusqu’au 4 janvier 2016 à la Comédie Française

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