Cinéma

Anomalisa

Des petites marionnettes font l’amour… et ça vous émeut. C’est le petit miracle offert par ce film d’animation mélancolique, presque misanthrope.

Auteur torturé, Charlie Kaufman a toujours travaillé sur le faux pour chercher le vrai. Les histoires rocambolesques qu’il écrit, sont marquées par cet alliage fou entre la réalité et l’art, la vérité et l’artifice, le quotidien et le rêve. Dans la peau de John Malkovich, Adaptation ou Eternal Sunshine of the Spotless Mind, quelques titres pour définir la singularité de l’auteur qui s’arrache encore un peu plus aux dictats d’Hollywood avec sa nouvelle création, encore plus étrange que les autres.
Vous prenez quelque chose de très artificielle… cette chose réussit à vous toucher. Malgré son aspect bricolé ou synthétique. Je ne sais pas vous, mais moi, j’appelle cela un tour de force.

La première fois que cela m’a vraiment fait cet effet incroyable, ce fut sur le film de Henry Selick, L’étrange Noel de Monsieur Jack. Mais c’est aussi un petit miracle qui se cache dans les films d’animation de Disney, Pixar ou de Folimages.

Ici, il s’agit d’un film pour adultes ! Il y a même une incongrue scène d’amour entre deux personnages ou plutôt les deux petits pantins qui pourtant vont bien nous faire vibrer. Leur morosité, on la partage, malgré les effets de stop motion : les acteurs de ce petit film sont simplement formidables !

Michael Stone (avec la voix du british David Thewlis) est donc la référence du service clients. Son livre a éclairé des milliers de téléopérateurs et le voilà, invité à Cincinnati pour une conférence ! L’homme n’est pas si enthousiaste que ça. Il traine avec lui un spleen profond.

Il profite de son passage en ville pour revoir une ancienne conquête. Le rendez-vous se passe mal. Angoissé et un peu alcoolisé, il frappe à la porte de ses voisins dans son hôtel. Il tombe automatiquement sous le charme de la discrète et naïve Lisa (et la voix exquise de Jennifer Jason Leigh)…

Mais le film ne sera pas une comédie romantique. Notre anti héros n’arrive pas à se défaire de ses doutes et son aigreur. Il a l’humour triste mais encore des espoirs quand il trinque avec la jeune femme. Il s’emporte tout comme son imagination.

Les thèmes chers à Kaufman sont présents : l’aliénation, la solitude et l’absurdité. Une fois de plus, la condition humaine fait souffrir les individus et Michael Stone est un triste sire, incapable de connaître le bonheur, condamné à supporter une existence banale.

Sorte de huis clos existentiel, le film profite de l’animation, astucieuse jouant sur toutes les ambivalences avec le réel. Il semble pourtant inabouti car le film se termine un peu trop vite. Il y a comme un goût d’inachevé dans cette histoire de solitudes qui se rencontrent ou s’affrontent. Pourtant le film est romantique et arrive à faire battre notre cœur. Un exploit avec de simples marionnettes !

Paramount – 3 février 2016 – 1h30

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